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Morneau-Guérin, Frédéric (2025). Lu pour vous : Discrete and Computational Geometry, 2nd Edition. Bulletin AMQ, LXV (1), 68-71.
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| Catégorie de document : | Articles de revues |
|---|---|
| Évaluation par un comité de lecture : | Non |
| Étape de publication : | Publié |
| Résumé : | La géométrie classique est morte et sa dépouille s’est fossilisée. Telle était l’opinion largement partagée au cours la majeure partie du XXe siècle. Qualifié de miraculeux, l’étonnant théorème du trisecteur, obtenu par le mathématicien anglo-américain Frank Morley en 1899, faisait figure d’ultime sursaut d’orgueil avant l’agonie. Le regard déjà porté vers d’autres horizons, le mathématicien professionnel type, ce chasseur de trésors, n’avait guère besoin d’être convaincu pour qu’il envisage la possibilité de céder la géométrie classique aux architectes, aux arpenteurs, aux charpentiers, aux ingénieurs, aux opticiens et aux urbanistes. En somme, considéré comme pleinement explorée, ce champ du savoir avait décidément perdu son prestige des temps passés. C’est en tout cas l’impression qui se dégage des propos tenus par Eric Temple Bell (1883-1960), ce mathématicien écossais qui connut un certain succès populaire lorsqu’il s’adonna à la chronique sur l’histoire des mathématiques, dans The Development of Mathematics : The geometers of the 20th century have long since piously removed all these treasures to the museum of geometry where the dust of history quickly dimmed their luster [Les géomètres du XXe siècle ont depuis longtemps pieusement transféré tous ces trésors au musée de la géométrie, où la poussière de l'histoire a rapidement terni leur éclat]. Le topologiste juif allemand Hans Freudenthal (1905-1990) pointait sensiblement dans la même direction lorsqu’il affirma ce qui suit dans un texte intitulé Geometry Between the Devil an the Deep Sea : For long times mathematics has been synonymous with geometry. In fact, there existed other branches, too, algebra, trigonometry, calculus, which, however, were not much more than collections of haphazard, badly founded rules, whereas geometry was a perfect logical system, where everything rigorously followed from definitions and axioms. You know that things have changed; today mathematicians are prone to reject traditional geometry, because it is not a rigorously deductive system. [Pendant longtemps, les mathématiques ont été synonymes de géométrie. En réalité, il existait d'autres branches, telles que l'algèbre, la trigonométrie et le calcul, qui n'étaient toutefois guère plus que des recueils de règles aléatoires et mal fondées, alors que la géométrie était un système logique parfait, où tout découlait rigoureusement de définitions et d'axiomes. Vous savez que les choses ont changé ; aujourd'hui, les mathématiciens ont tendance à rejeter la géométrie traditionnelle, car elle n'est pas un système rigoureusement déductif.]. Et que dire de la formule-choc assénée par Jean Dieudonné (1906-1992) – le grand mathématicien lillois comptant parmi les membres fondateurs, mais aussi parmi les plus prolifiques, de l’influent groupe Bourbaki qui s’était positionné comme fer de lance du formalisme et de la hiérarchisation des structures abstraites – lors d’un séminaire, en 1969 : « À bas Euclide! Mort aux triangles! ». Sous l’impulsion imprimée par Bourbaki, la géométrie – déjà en voie de se dissoudre dans l’algèbre et l’analyse – était en train de se redéfinir en une discipline sans diagrammes ni représentations visuelles, où tous les résultats ne devaient être obtenus que par le raisonnement. Indigne de confiance, car elle nous abandonnait à la subjectivité et à l’erreur, la perception visuelle du réel devait être expurgée des mathématiques. Fort heureusement, il s’en trouva – comme Harold Scott MacDonald Coxeter – pour s’opposer à cet effort de raréfaction de l’atmosphère dans laquelle s’effectuent les mathématiques et pour tenter de réhabiliter l’indispensable imagerie interne dans un premier temps, puis l’utilisation de supports visuels pour favoriser, sinon la compréhension, du moins l’apprentissage, dans un deuxième temps. Satyan L. Devadoss et Joseph O’Rourke, respectivement professeurs au Williams College et au Smith College, appartiennent au courant alimenté par Coxeter. Ils nous proposent, dans la seconde édition de Discrete and Comptutational Geometry, publiée aux presses de l’Université Princeton, un remarquable ouvrage d’introduction à une branche relativement récente des mathématiques dont les racines puisent à des sources remontant à l’Antiquité grecque et dont les fruits sont résolument ancrés dans le XXIe siècle. |
| Déposant: | Morneau-Guérin, Frédéric |
| Responsable : | Frédéric Morneau-Guérin |
| Dépôt : | 18 nov. 2025 15:59 |
| Dernière modification : | 18 nov. 2025 16:00 |
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